Après Eric Berne, l’AT continue
Au sein de cette « A.T. classique », les différentes approches sont considérées comme complémentaires et susceptibles d’être combinées en dépit de leur divergences.
José Grégoire – Les orientations récentes de l’analyse transactionnelle
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Une école de pensée désigne un ensemble de personnes qui partage des opinions semblables ou un point de vue similaire en philosophie.
Eric Berne a fait de l’AT une discipline ouverte, dans la mesure où le processus reste éthique et contribue à guérir le patient. Nombre de transactionnalistes ont alors apporté leur singularité en contribuant à son développement.


Aujourd’hui encore, l’AT évolue. Chaque trimestre paraît la revue Actualités en analyse transactionnelle (AAT) en français, et le Transactional Analysis Journal (TAJ), en anglais, qui questionne les pratiques. Chaque analyste transactionnel peut y contribuer en écrivant des articles de fond qui contribueront au développement de l’AT. Les cinq écoles présentées ci-dessous sont extraites d’un article de J. Wilson & I. Karina, publié dans le Classique des ATT n°1.
Les certifications en analyse transactionnelle, une promenade!
L’analyse transactionnelle est réputée pour être une approche rigoureuse, voire fastidieuse, du fait de la durée de ses contrats de certification.
En effet, pour être analyste transactionnel certifié, la durée du contrat est de 5 ans, renouvelable indéfiniment. Cette durée est estimée dans un prolongement immédiat de la formation 101 mais, le candidat passe son examen quand il se sent prêt, sachant que la durée minimum est de 1 ans après la signature du contrat.
Pour devenir formateur et superviseur, le candidat s’engage dans un contrat qui dure 7 ans, renouvelable 1 fois. Là encore, le candidat décide de se présenter quand il se sent prêt, en concertation avec son superviseur principal. Dans les faits, la durée de formation varie de 4 à 14 ans, en fonction de l’énergie investie.
Le réflexe est de comparer les processus de certification en AT avec ceux d’autres approches. J’ai été certifié DISC en 4 jours, j’aurais pu l’être en Process Communication en 5 jours. Aujourd’hui, certaines formations pour devenir superviseur durent 8 jours, répartis sur quelques mois.
La comparaison ne vaut qu’à la mesure de l’enjeu.
Si l’enjeu est fort, notamment pour faire de la certification un argument commercial, alors mieux vaut s’engager vers d’autres approches. Les certifications en AT ne sont pas reconnues sur le marché du travail et le retour sur investissement n’est pas garanti.
S’il y a comparaison alors que ce soit avec une randonnée. Interrogeons-nous sur la façon de choisir son itinéraire :
- Pour quelle raison s’engager dans ce parcours ?
- Comment faire pour aller au bout ?
- Quelles envies me motivent, quel plaisir en tirer ?
J’aime partir en randonnée pour sentir le sol sous mes pieds, sentir mes muscles se contracter, me relier à la nature, découvrir de nouveaux horizons. J’ai néanmoins besoin d’un plan, voire d’un GPS, pour ne pas me perdre. Je m ‘arrête quand je veux, où je veux, je peux changer d’itinéraire ou faire demi-tour. Je prends plaisir à marcher.
S’engage-t-on sur les chemins escarpés pour arriver au bout le plus rapidement possible ? Le bout n’est pas un but, c’est seulement la fin.
Aujourd’hui je suis engagé dans le cursus de formateur et superviseur en analyse transactionnel et c’est avec cette légèreté que j’avance dans mon parcours.
Rien ne m’oblige à aller à l’examen mais je sais comment faire pour avancer. Chaque jour est un petit pas qui m’oblige à regarder où vont mes pieds.
Pourquoi les gens n’écoutent pas les conseils ?
C’est une histoire que tout le monde connaît et vit plus ou moins régulièrement. Quelqu’un vient vous voir et vous dit :
« J’aurais besoin d’un conseil, … ». La personne semble attendre votre avis sur la question pour prendre une décision. Justement, vous avez une idée que vous proposez. Dès le conseil apporté, la réaction est « oui mais,… ». Vous argumentez, vous illustrez, vous apportez des exemples et la réaction est de nouveau : « oui mais, … ».
Vous venez d’entrer, involontairement, dans un jeu psychologique. Votre objectif est maintenant d’en sortir.
Les jeux psychologiques finissent mal
Eric Berne, fondateur de l’analyse transactionnelle, a observé des mécanismes dans les relations interpersonnelles, qui n’apportent rien de positif et qui pourtant sont répétitifs. Au terme de l’échange, chacun repart avec du ressentiment, sans en comprendre véritablement l’origine. Pour autant ce système présente un « intérêt » puisqu’il permet de valider des croyances personnelles, sur soi, les autres ou le monde en général. Berne a nommé ces phénomènes des jeux psychologiques[1]. Ils sont relativement fréquents, répétitifs, inconscients et finissent mal car à la fin de l’entretien chaque personne éprouve un sentiment inexplicable et désagréable.
Dans l’exemple ci-dessus, le jeu psychologique est celui du « oui, mais… ». Bien sûr, tout le monde y joue. Dans un environnement professionnel, il est utile de le repérer.
Quand un collaborateur ou un collègue cherche un conseil, que demande-t-il vraiment ?
A un niveau social, la demande concerne un problème à résoudre.
A un niveau psychologique, hors champ de la conscience, la demande est d’un autre ordre. Il peut s’agir d’une attente de validation d’une idée déjà aboutie avec la nécessité de se convaincre qu’il s’agit de la meilleure possible. Cela s’apparente à une demande de prise en charge pour partager le poids d’une décision.
Dans ces circonstances, à la suite du conseil, les réactions seront : « oui mais, … ». Si cela se répète plus de deux fois, la conversation se situe dans un jeu psychologique.
Pour jouer il faut être au moins deux
Au terme du jeu psychologique, l’apporteur de conseil se sentira tout aussi désabusé que le demandeur. Chacun sa part de responsabilité dans cette histoire, y compris à l’apporteur de conseil. Pourquoi s’évertue-t-il à répondre aux « oui mais, … ». Il y a vraisemblablement un intérêt à vouloir résoudre un problème qui ne lui appartient pas. Il en tirera reconnaissance et gratification personnelle qui le convaincront de son utilité dans l’organisation.
Inconsciemment, nous rentrons dans des rôles pour jouer aux jeux psychologiques. Ici, il s’agit du « Sauveteur ». La majuscule différencie le rôle dans les jeux de celui qui consiste à, officiellement, porter secours.
Certains Sauveteurs n’attendent pas les demandes pour proposer des solutions et mettent en évidence le nom complet du jeu psychologique : « pourquoi ne fais tu pas …..oui mais,… ». « oui mais,… » n’étant que le raccourci.
Le demandeur est lui dans un rôle de « Victime ». Là encore, la majuscule différencie le rôle dans les jeux psychologiques de l’état de souffrance dans lequel se trouvent certaines personnes suite à une atteinte à leur intégrité physique ou psychologique. La « Victime » se considère démunie, incapable de résoudre son problème seule.
Peut-on conseiller sans jouer ?
Certaines demandes de conseil sont sincères et le demandeur prend ce qui lui est proposé. L’issue du conseil n‘est donc pas systématiquement dans les jeux psychologiques.
Pour ma part et pour limiter le risque, je me limite autant que possible aux conseils informatifs, conseiller sur de l’information susceptible d’aider la personne.
Une autre option pour aider sans « Sauver » est la pratique de la maïeutique, technique socratique bien connue des coachs qui consiste, par le questionnement, à amener le demandeur à prendre conscience de ce qu’il sait déjà.
[1] Eric Berne – Des jeux et des hommes – Ed Stock
Une nouvelle expérience de supervision – III

Auteurs : Stan Madoré et Myriam Chéreau.
Co-supervision et intimité dans un groupe
Troisième partie
Une intimité[1] sans attachement.
Pour que la relation soit de l’ordre de l’intimité entre les deux superviseurs, il est nécessaire qu’ils y y soient prêts, en conscience de ce que cela signifie. Il s’agit de se montrer, sans far, à son collègue, devant le groupe. Par le silence ou le questionnement, chacun vise à accepter et comprendre les motivations de l’autre, au profit de la personne supervisée. En agissant ainsi, ils montrent la prévenance qu’ils ont l’un pour l’autre, l’acceptation inconditionnelle de ce qui est dit et qui implique une confiance envers l’autre. Les superviseurs s’écoutent, s’ajustent et associent leurs questions. Cela signifie que parfois ils se refrènent à intervenir et doivent gérer leur frustration, dans l’objectif de laisser de l’espace au supervisé. Le contrat entre eux doit être clairement établi.
C’est parce que ce processus est protecteur pour les superviseurs qu’il l’est aussi pour le groupe. En exposant leurs accords, mais aussi leurs interrogations et leur vulnérabilité, les superviseurs construisent un espace contenant et sécurisant où chacun trouve sa place. Chaque membre du groupe, chaque témoin, met en résonance les propos des superviseurs avec son propre vécu. Les émotions des superviseurs jouent un rôle de permission pour les supervisés. Le partage du vécu émotionnel est un apprentissage de l’intimité pour le groupe. Le sentiment de honte, inhibiteur de l’intimité, se trouve alors mis à distance[2].
Intimité et apprentissage
Nous soutenons l’idée que l’apprentissage dans la supervision passe par l’intimité dans le groupe et inversement que l’intimité est en soi un apprentissage.
L’Adulte intégrant conscient et actif dans l’intimité
Ces processus et attitudes sont rendus possibles par l’expansion de l’Adulte intégrant défini par Tudor : « c’est un Etat du moi qui caractérise une personnalité pulsatile, qui intègre des sentiments, attitudes et comportements appropriés à l’ici et maintenant, à tous les âges de la vie, de la conception à la mort ». Cela nous amène à prendre conscience dans le dialogue ou la co-supervision, de nos différences et ressemblances tout en s’abstenant de tout jugement de valeur sur soi, sur l’autre, sur la relation, sur le supervisé. L’Adulte intégrant est sans cesse en évolution et intègre les expériences du présent en continu. Nous pourrions résumer cela par : je suis, tu es, il ou elle est OK (la personne supervisée).
Le dialogue et sa fonction didactique
Habituellement, le superviseur ne partage pas ce qu’il a fait, ni comment il a traité, par exemple, la confusion émotionnelle du supervisé. Cette part de la supervision, comme une terra incognita inexplorée, reste un espace privé de sa propre pensée. Or nous faisons l’hypothèse que mettre au jour ce travail d’élaboration de la pensée du superviseur est très formateur pour le groupe. Loin d’être celui qui sait et gagne du pouvoir sur l’autre dans une position sociale OK+/OK-, le superviseur ose expliquer ce qu’il a fait, pourquoi et comment il pense[3]. Il est dans une posture d’Affirmation de soi (Acey Choy AAT n°61).
Ce processus d’explicitation est un puissant levier d’apprentissage. En dialoguant sur nos interventions, devant le groupe, nous créons les conditions d’une relation Adulte-Adulte entre superviseurs et avec le groupe. Nous démystifions une vision du superviseur tout puissant et sachant en partageant les difficultés rencontrées dans l’accompagnement. La relation Adulte-Adulte avec le groupe s’en trouve simplifiée. Nous instaurons ainsi le principe du « nous », premier pilier de l’AT co-créative.[4]
Quelle que soit la forme de la supervision, conduite par un ou deux superviseurs, les trois personnes ont un rôle actif. La personne supervisée sait qu’il y aura le temps du dialogue qui lui apportera un éclairage sur le processus en place. Si un superviseur observe, il sait qu’il parlera de ce qu’il pense, ressent et comprend de la stratégie de son collègue. De fait, le dialogue est un outil didactique. Au-delà de la relation interpersonnelle, il contribue à clarifier ce qui se passe à un niveau intrapsychique dans une supervision. Les superviseurs apprennent de leur pratique dans une position meta. Le groupe et le supervisé mettent des mots sur le processus qu’ils ont pu vivre ou observer et découvre l’inévitable contingence, et parfois les impasses, dans les métiers de l’accompagnement. Au-delà de l’apprentissage de l’AT et de sa pratique, c’est un modèle d’intervention que nous proposons au groupe.
Illustrations du dialogue
Dialogue après une supervision conduite par un seul superviseur
Dans ce dialogue, le superviseur qui a conduit la supervision répond aux questions. Le superviseur-observateur dit ce qu’il a vu, entendu et compris de ses observations.
Que s’est-il passé pour toi ?
« – J’ai vécu cette supervision comme plutôt technique, centrée sur le processus parallèle que nous vivions au début, dans les premières minutes. Je ressentais le processus parallèle et cela m’agaçait car je me demandais quand y mettre fin. Cette question se posait à moi pour pouvoir passer le contrat de la supervision. Et J’ai pris la décision de laisser du temps au supervisé pour qu’il puisse élaborer sa demande. Cette position OK/OK m’a permis d’être bien centré sur mon ressenti tout en étant en contact avec lui, dans l’instant présent. Cet agacement a cessé quand j’ai pointé le processus parallèle. Qu’en penses-tu ?
– J’ai compris que ta supervision avait une visée didactique par le fait que tu as explicité le processus parallèle et partagé avec l’autre ton ressenti. C’était puissant et utile d’un point de vue pédagogique. J’ai vu que le supervisé manifestait une grande écoute quand tu lui parlais ainsi, et je l’ai vu plus calme qu’au début de la supervision.
Quelle a été ta stratégie ?
– Je souhaitais que Valentin[5] prenne conscience de ce qui se passait entre nous pour qu’il comprenne ce qui se passe avec son client. C’était ma stratégie.
– En effet, tu l’as aidé à penser par cette prise de conscience avec un Adulte décontaminé.
– Oui, et j’ai utilisé aussi l’opération bernienne de confrontation dans l’Adulte. Là aussi, c’est dans l’objectif que Valentin puisse différencier une confrontation dans l’Adulte et dans le Parent.
– C’est pour ça que j’ai trouvé cette supervision didactique, parce que tu nommais ce que tu faisais et tu donnais des explications sur ce qui était en lien immédiat avec tel ou tel processus. Tu t’es concentré surtout là-dessus.
En quoi ta supervision, tes choix ont-ils contribué à aider Valentin ?
– J’ai fait le choix de travailler sur le processus parallèle pour aider le supervisé à conscientiser ce qui se passait entre nous et avec son client. J’ai fait ce choix pour respecter le contrat même si d’autres options étaient possibles. Là aussi, l’objectif est de lui montrer que dans un accompagnement, il y a des choix à faire, donc des renoncements à gérer.
Dialogue avec une supervision conduite par deux superviseurs
Quand la supervision a été conduite par les deux superviseurs, chacun d’eux, dans le dialogue, s’exprime sur les trois questions.
Que s’est-il passé pour chacun de nous ?
Superviseur A :« – J’ai vu que nous prenions le même chemin avec des moyens différents, toi en utilisant les Etats du Moi et pour ma part, en l’aidant à différencier le processus du contenu. Et j’ai trouvé que c’était stimulant. Nous sommes restés attentifs à ne pas perdre Clémentine.
Superviseur B – Oui, je l’ai vu aussi. J’ai choisi de travailler avec ce qui se passe pour elle en interne, en de ce que dit Pamela Levin sur le pouvoir de penser.
Superviseur A- C’était une bonne idée, « le pouvoir de penser » était éclairant. Le contrat que nous avions pouvait se traiter autant avec une approche psychodynamique qu’interpersonnelle ».
Quelle a été la stratégie ?
Superviseur B – mon intention a été guidée pas sa première phrase « il faut faire des choix, je vais en faire un, je vais faire un pas de plus vers l’expression de ma pensée ». Je me suis fait confiance et je t’ai fait confiance quand j’ai vu que nos chemins étaient différents.
Superviseur A – Faire confiance à Clémentine est la stratégie que nous avons suivie avec des moyens différents : moi j’ai abordé les émotions et toi les croyances et les pensées. Certes c’est différent, et complémentaire à la fois. « Pour faire un pas de plus vers sa pensée », il était nécessaire à mon avis de l’aider à sortir de la confusion émotionnelle.
Superviseur B – Le travail que nous avons ensuite fait avec lui sur l’impasse d’autorité, a constitué une autre prise de conscience. « Pour aller vers sa pensée », elle a besoin de résoudre l’impasse entre le Parent et l’Enfant et d’activer l’Adulte qui doit être activé dans ses coaching.
Superviseur A- Il est possible qu’il y ait d’autres impasses. Ce n’est plus du domaine de la supervision mais plutôt de la thérapie. Il me semble aussi important de dire que cette forme particulière d’accompagnement qu’est la co-supervision, crée de l’intimité dans le groupe de supervision.
Est-ce que la supervision a contribué à aider la supervisée ?
Superviseur A- Je le pense. Ce processus de différenciation que Clémentine a pu vivre avec les deux superviseurs, loin de la perdre, lui donne des permissions pour coacher à sa manière, avec son style, tout en respectant le contrat.
Superviseur B – Oui, je le crois, au moins en partie. Elle a d’ailleurs verbalisé au moment où elle a voulu poursuivre le travail sur ses émotions. Nous l’avons accompagné dans le cadre de notre rôle de superviseur. Voilà.
Conclusion
Nous avons présenté un nouveau modèle de supervision en groupe. Son originalité repose sur les processus qui favorisent la mise en œuvre de l’intimité.
Voici, au terme de cet article, des témoignages de membres du groupe sur les vertus du dialogue des superviseurs devant le groupe. Qu’ils en soient ici chaleureusement remerciés.
Clémentine « En tant que supervisé, je trouve que le dialogue entre les deux superviseurs prolonge et nourrit à un autre niveau ma propre supervision ; cela m’aide à intégrer des concepts pour ma pratique de coach ; votre transparence à dire ce que vous faites dans cette intimité me rassure »
Sylvain « ce qui est la chose la plus importante pour moi c’est la bienveillance entre vous : cela m’inspire de vous voir et de vous entendre parler de ce qui s’est passé pour vous dans la supervision sans se mettre en danger »
Laurent « Selon moi, ce dialogue dans lequel vous dévoilez votre stratégie favorise mon autonomie. Il m’invite à me questionner sur ma propre stratégie dans mes accompagnements.
Lucie « En montrant votre Vulnérabilité au sens de Choy dans le triangle gagnant, c’est décontaminant car cela fait tomber des préjugés du Parent et des illusions de l’Enfant. C’est donc une posture vraiment Adulte que je peux modéliser. Je fais sans doute moins de projections et de grandiosités grâce à ce processus qui pour moi est une démarche d’apprentissage. »
Élise « Avant d’intégrer le groupe de supervision, je me disais en tant que coach, il faut que je sache ; et puis je vous entends dire : « là, je ne sais pas ». Et bien je me reconnais et ce processus donc me donne la permission de ne pas savoir, de prendre conscience que je ne sais pas et de faire avec ! Du coup en vous faisant confiance même si vous ne savez pas, je me fais confiance aussi. Et je peux davantage partager ce que je vis dans ma supervision avec vous. Je me reconnais votre égal ».
Valentin « Oui et ce qu’on partage, c’est l’analyse transactionnelle aussi bien dans les contenus que dans ce processus innovant de coanimation et d’intimité.
[1] Trudi Newton et Hilary Cochrane – supervision for coaches, a guide to thoughtful work, 2011
[2] Valérie Perret – La honte, fléau de la supervision – AAT 158
[3] Acey Choy – Le triangle du gagnant – AAT 61
[4] Tudor et Summers- une analyse transactionnelle co -créative-AAT n°100
[5] Tous les prénoms ont été modifiés
Symbiose et fanatisme

Depuis 2017, les théories conspirationnistes fleurissent aux USA et se répandent sur la planète aussi vite que le covid-19. À l’origine, des messages sur le réseau social « 4chan », peu connu du grand public. Ce réseau n’est pas modéré et tout peut être publié. Un certain Q a commencé à écrire des messages complotistes. Il existerait un état profond au sein du Congrès américain qui manipulerait la nation entière. Il serait, entre autres, à la tête d’un réseau de pédophiles, dont Hillary Clinton ferait partie. Plus le propos est délirant, plus il est séduisant. Cela peut paraitre incroyable mais des centaines de milliers de personnes adhèrent à ces histoires. Elles se sont regroupées sous la bannière QAnon, pour Q anonyme ; Q étant le profil sous lequel les messages sont publiés, anonymement. Comme dans tous les contes, il faut un sauveur, un génie, un prince charmant ou une bonne fée. Les adeptes de QAnon ont placé leur foi en la personne de Donald Trump. Lui seul pourra sauver le monde. Le président sortant a bien volontiers accepté le rôle que QAnon lui offrait et c’est ainsi qu’est né un mouvement sectaire. En plus d’être président Trump est devenu gourou avec tout le fanatisme que cela génère. Nous avons pu le constater lors de l’élection de Joe Biden avec le soutien indéfectible par une frange de ses supporters, considérant que l’élection a été manipulée et volée. Fort heureusement, il n’y a pas eu les débordements redoutés. Ce phénomène est comparable aux mouvements extrémistes islamistes. Les partisans de l’idéologie perdent tout discernement pour se suradapter à la parole du Leader Divin. Leurs comportements peuvent alors devenir violents.
En AT, la suradaptation et la violence font partie des comportements passifs qui servent à maintenir la symbiose.
Le concept de symbiose est la base théorique de l’École des Schiff. Jacquie Schiff, au départ, proche d’Éric Berne dans les années 1960, s’est expatriée sur la côte Est des États-Unis pendant quelques années. C’est pendant cette période qu’elle a développé sa théorie qui s’en trouve être en marge du reste de l’AT mais reste très intéressante sous certains aspects. Notamment, pour comprendre le fanatisme.
La symbiose

Selon les Schiff[1] et leurs collaborateurs, il y a symbiose lorsque deux personnes n’ont pas accès à leurs trois états du moi. Elles se comportent alors comme si, ensemble, elles ne formaient qu’une seule personnalité complète. La caractéristique de cette relation est, qu’aucune d’elles ne met en œuvre la gamme complète de ses états du moi.
C’est par la symbiose que les personnes réitèrent leurs jeux, perpétuent leurs sentiments parasites et font avancer leur scénario.
Cette relation est considérée comme normale entre une mère et son bébé et va s’arrêter dès lors que le bébé va prendre conscience de sa propre existence. Quand elle perdure à l’âge adulte, la relation devient malsaine car elle se construit et s’autoalimente avec des jeux psychologiques.
la chaine symbiotique

Dans son article, Quintin Holdeman[1] utilise le concept de chaine symbiotique comme étant un système de fonctionnement dans certaines organisations. De la Boétie[2] aurait nommé cette chaine « système de la servitude volontaire ; un tyran seul n’a de puissance que celle que le peuple lui donne ».
Ce système s’autoalimente par une obéissance inconditionnelle aux directives venues « d’en haut » et en retour, d’abondants signes de reconnaissance à l’égard du chef. Ce qui est une norme socialement acceptable dans une organisation hiérarchisée peut devenir un mouvement sectaire, avec le culte du chef.
Ici le pilier est représenté ici par A. Il dirige et décide de manière autocratique, ce qui installe une dépendance avec l’ensemble des membres de son organisation. Le jour où A quitte l’organisation, le système s’écroule tel un château de cartes. Les membres n’ayant pas eu l’occasion de se prendre en charge et de décider de ce qu’il convient à leur destin. Ils pensent que personne d’autre que A n’est capable de prendre en main la destinée de leur organisation. Parfois le leader A est rappelé tels de Gaulle en 1958, Steve Jobs en 1997, Zidane en 2005 et bien d’autres encore.
La chaine symbiotique triangulaire

Un système sectaire est plus sophistiqué. Je propose une approche qui repose sur une symbiose triangulaire et tentaculaire : un Leader Divin, un Prédicateur et des Fidèles.
L’initiateur de cette symbiose est le Prédicateur. Il place sa foi dans un leader qu’il divinise. Sa force de conviction lui permet de rassembler autour de lui des adeptes qui vont ensuite essaimer et devenir à leur tour, Prédicateurs. Ainsi, ces mouvements deviennent tentaculaires, à l’image de QAnon. Les religions sont également des exemples de réussite de ce mécanisme.
Le phénomène de divinisation s’observe généralement à la mort du leader. Selon Berne il s’agit d’évhémèrisation, en référence à Evhémère, mythographe de la Grèce Antique qui pensait que les dieux n’étaient autres que des hommes et des femmes divinisés. Les organisations ont souvent un évhémère. Berne étant celui de celui des analystes transactionnels, Freud celui des psychanalystes, Édouard Leclerc celui des supermarchés éponymes…
Le profile Q sur le réseau 4chan, avec ses fake news, annonce de graves délits et prévoit le pire pour les États-Unis puis la terre entière. Il prend le rôle de Prédicateur et en désignant Trump comme sauveur de l’humanité, il lui offre la place de pilier et Leader Divin dans la chaine symbiotique triangulaire. À la différence d’une entreprise, chaque membre d’un tel rassemblement voue une passion au Leader Divin jusqu’au passage à l’acte, dans les cas les plus extrêmes.
Le Fidèle devient alors totalement fanatique et est prêt à se sacrifier pour venger le Leader Divin, l’estimant bafoué. Nous pensons que ce comportement est la manifestation d’une symbiose de second ordre.
La symbiose de second ordre

Ce niveau de symbiose est plus profond et inaccessible à tout individu sans une aide psychothérapeutique. Il se déroule dans le schéma structural de second ordre. La mère ayant mis à distance ses besoins en excluant son état du moi Enfant, dans la symbiose de premier ordre, le bébé peut ressentir et décider inconsciemment de s’occuper des besoins de maman. Normalement, ce comportement n’a plus d’influence pathologique à l’âge adulte, sauf dans certains cas[3]. Si la croissance du bébé se déroule dans un environnement hostile, tant sur le plan émotionnel que physique, la symbiose de second ordre peut constituer un comportement dominant générant des troubles psychologiques sévères.
Sous l’influence d’un Prédicateur, un Fidèle peut alors basculer dans le terrorisme et assouvir sa soif de vengeance.
[1] A & J Schiff – La passivité – CAAT 2
[2] Holdeman – La chaine symbiotique – AAT 59
[3] De la Boétie – Discours de la servitude volontaire.
[4] Salomon Nasielski – Symbiose de second ordre : retour au concept originel – AAT 142
5C – 1D, comment obtenir des signes de reconnaissance – part 1
Dans ses travaux sur « l’hospitalisme », Spitz a montré qu’il ne suffisait pas de nourrir un bébé pour qu’il se développe normalement. Il lui est nécessaire de recevoir de l’affection, d’être pris dans les bras de sa mère ou sa nourrice, d’être caressé. Sans contact, sans amour, les nourrissons dépérissent ou, s’ils s’en sortent, gardent de graves séquelles psychologiques. Berne a pris en compte les travaux de Spitz dans son apport sur les 3 soifs.
- Le bébé (puis l’adulte) a besoin d’être stimulé
- Il a besoin d’être caressé (strokes en anglais). L’adulte a aussi ce besoin. Dans ce cas, il s’agit de caresses psychologiques. En français nous parlons de signes de reconnaissance (SR)
- Pour obtenir des SR l’adulte va structurer son temps.
Pour Berne, chaque transaction est en soi un SR. En leur absence, la personne voit « sa moelle épinière se flétrir », c’est à dire qu’elle dépérit, isolée. En d’autres termes, l’absence de signes de reconnaissance est préjudiciable à une bonne santé psychique. Nous pouvons le constater quand certaines catégories de personnes se retrouvent victimes d’exclusion : les chômeurs qui se sentent inutiles, les personnes âgées qui n’ont plus de contacts sociaux et se meurent d’ennui…
Chaque transaction est un contact social et un SR : dire bonjour à son voisin, prendre un café avec son collègue ou exercer une activité en lien avec d’autres personnes sont autant d’échanges de signes de reconnaissance.
Comme les SR nous permettent de vivre bien, nous les recherchons systématiquement en structurant notre temps. Berne a classé la structuration du temps en 6 étapes. Retrait, rituel, passe-temps, activité, jeux psychologiques, intimité. A chaque étape son lots de SR.
Claude Steiner, dans une approche didactique, nous apprend à gérer les SR. Conditionnels, les SR portent sur ce qui est fait, Inconditionnels, ils portent sur l’être. Dans les deux cas, les SR peuvent être positifs ou négatifs. Notons au passage que les SR conditionnels ne peuvent exister qu’au niveau de l’Activité.
Quant à Raymond Hostie il apporte un regard supplémentaire en présentant la structuration du temps sous forme de compas et en évaluant l’intensité des signes de reconnaissance.
Dans le prochain post, nous découvrirons qu’elles sont les conditions pour obtenir, à chaque étape de la structuration du temps, des SR.
Les écoles récentes en AT
Le monde évolue et l’AT aussi. Le premier cercle des proches d’Eric Berne ayant montré la voie, d’autres analystes transactionnels leur ont emboité le pas en intégrant leur pratique à la théorie. L’AT continue donc à se développer. José Grégoire, dans son livre Les orientations récentes de l’analyse transactionnelle, a recensé plusieurs écoles, à noter que tous ces théoriciens sont du champ Psychothérapie . Citons ici ces nouvelles écoles.
- L’analyse transactionnelle psychanalytique, de Carlo Moïso et Michele Novellino ;
- La psychothérapie intégrative, de Richard Erskine et Rebecca Trautmann ;
- L’analyse transactionnelle relationelle, de Charlotte Sills et Helena Hargaden ;
- L’approche corporelle relationnelle, de Bill Cornell ;
- L’analyse transactionnelle co-créative, de Graeme Summers et Keith Tudor ;
- L’approche narrativiste, de Jim et Barbara Allen.
Quel lien entre l'AT et d'autres approches psychothérapeutiques ?
On connaît l’attachement de Berne à la psychanalyse et à son fondateur Sigmund Freud. Jusqu’à la fin de sa vie Berne est resté un grand admirateur de Freud même si sa pratique l’a amené à développer l’AT, mettant ainsi de la distance avec la psychanalyse. Le divan est resté présent dans sa salle de consultation.
Les années 60 ont vu aussi se développer l’école de Palo Alto, à quelques kilomètres de Carmel. Eric Berne était l’ami de Grégory Bateson, le fondateur de l’école. Il était également l’ami de Fritz Perls, qui s’est aussi éloigné de la psychanalyse pour créer la Gestalt thérapie. Notons enfin plusieurs référence dans l’œuvre de Berne à Alfred Korzybski, inventeur de la sémantique générale, dont le but était de montrer l’influence du langage dans les comportements. Quelques années plus tard la PNL exploitera l’idée que la carte n’est pas le territoire.